Réforme du code du travail, premières rencontres

Compte-rendu de la rencontre avec le président de la République

La CGT a été reçue, comme l’ensemble des organisations syndicales et patronales, par le président de la République, mardi 23 mai. Cette rencontre était une prise de contact, en aucun cas une concertation, une négociation ou le début d’un processus quelconque.

  1. La CGT a fait part de la situation d’un certain nombre d’entreprises telles que Tati, Arques, Vivarte, Whirpool, GM&S ou Sillia. Sur chacun de ces cas, l’accent a été mis sur la responsabilité des gouvernements successifs et sur les conséquences de leurs choix ou de leurs lois. (…)
  2. Une liste des sujets prioritaires pour la CGT lui a été remise. Le président a confirmé ses positions, développées dans son programme, en matière de salaire avec uniquement une augmentation de la prime d’activité, sur les retraites ou sur l’assurance-chômage. Il a confirmé sa volonté de faire un effort financier sur les questions de formation, notamment par le biais de l’apprentissage et de l’alternance, ainsi que sur la formation des chômeurs en donnant plus de moyens à Pôle Emploi.
  3. Emmanuel Macron a confirmé vouloir faire de l’égalité salariale femmes/hommes une des priorités de son mandat. Il a retenu l’idée de la CGT de pénaliser financièrement les entreprises ne respectant pas la loi en la matière, sans en préciser les modalités concrètes.
  4. Un point a été fait sur les questions de l’industrie et des services publics, sans véritable précision de la part d’E. Macron sur ces deux sujets, si ce n’est l’industrie du futur et la réduction des dépenses publiques.
  5. Enfin, à propos de la question du code du travail : la CGT lui a suggéré la lecture du nouveau code du travail simplifié avec droits collectifs renforcés (ouvrages du GR-PACT).

Compte-rendu de la rencontre du 29 mai 2017 entre le premier ministre, la ministre du travail et la CGT

Pour le gouvernement : Pierre André Imbert (conseiller social du président de la République) ; Edouard Philippe (premier ministre) ; Thomas Fatome (directeur adjoint du cabinet du premier ministre) ; Franck Morel (conseiller social du premier ministre) ; Muriel Pénicaud, ministre du travail ; Antoine Foucher (directeur du cabinet de la ministre du travail) ; Yves Struillou (directeur général du travail).

Pour la CGT : Philippe Martinez, secrétaire général ; Catherine Perret, Fabrice Angei, Mohammed Oussedik, direction confédérale.

La discussion s’est articulée autour des questionnements et des propositions de la CGT.

1° – Quant à la méthode de pilotage de la réforme du code du travail.

La CGT a rappelé que la loi travail n’avait pas été véritablement pilotée par le ministère du travail, dont c’est pourtant le champ de compétence direct. Elle pose la question de ce qu’il en est, s’agissant des annonces du président de la République, en matière de réforme du code du travail et de la méthode qu’il en découlera. Le Premier Ministre a répondu que cela relevait bien de la Ministre du Travail. La réforme se déroulera en quatre temps : un premier cycle d’échange direct entre le secrétaire général de chacune des organisations syndicales représentatives et le Président de la République (rencontre du 23 mai 2017 ; cf. compte-rendu). Un deuxième temps de bilatérales avec le Premier Ministre et la Ministre du Travail (rencontre de ce jour) ; une rencontre avec la Ministre du Travail pour aborder dans le détail les dispositions de la réforme et au final la production d’une feuille de route est prévue pour le mardi 6 juin. La discussion avec les organisations syndicales précédera la discussion parlementaire.

Le Premier Ministre rappelle qu’il est dépositaire des engagements du Président de la République. A savoir : une détermination forte, un sentiment d’urgence, une ouverture complète à la discussion avec les organisations syndicales. Il précise sa volonté que toutes soient mises sur le même plan, à égalité et équité de traitement.

2° – Nécessité d’un bilan sur les conséquences de la loi Rebsamen (sur la conception du dialogue social).

La CGT a rappelé que si le dialogue social a été le maître mot du précédent quinquennat, dans les faits, la négociation collective n’a pas été au rendez-vous. En atteste, entre autres, la négociation interprofessionnelle qui s’est traduite par un échec ouvrant la voie à la loi Rebsamen. La CGT a mis des propositions sur la table pour garantir de l’ANI, à l’entreprise la loyauté de la négociation. Une négociation avec les organisations patronales s’est ouverte et a été stoppée en cours de route. Assurer la loyauté des négociations est à la fois un préalable à toute réforme du droit du travail et un dossier à ouvrir en urgence.

Pas de réponse du Premier Ministre.

3° – Nécessité d’un bilan sur les conséquences de la loi travail. L’ensemble des textes d’application sont sortis concernant la loi travail avec des traductions évidemment concrètes dans les entreprises (à l’exemple de ce qu’il s’est passé à RTE). La CGT demande que, sur ces bases, une évaluation soit faite quant aux effets et aux conséquences pour les salariés.

Pas de réponse du Premier Ministre, si ce n’est de préciser qu’il ne s’agit pas, en l’occurrence, de toucher au contrat de travail. « Seulement » trois thématiques sont à l’ordre du jour : indemnisation des licenciements jugés abusifs, référendum d’entreprise, instance unique de représentation du personnel (NB : devraient faire l’objet des ordonnances).

4° – Demande d’un agenda précis permettant à la fois l’évaluation des précédentes réformes et une véritable négociation.

Le Premier Ministre fait état de trois grands chantiers à ouvrir dont les temporalités pour chacun des trois blocs diffèrent. En premier, approfondir la loi travail, le second dossier relatif à l’assurance chômage et, à plus long terme, la réforme des retraites. A ce stade le Premier Ministre n’a pas communiqué un calendrier précis même si les discussions devraient aller au-delà de la fin août.

5° – La décentralisation de la négociation à l’entreprise et le dumping social.

La CGT rappelle que le code du travail doit rester le socle commun aux salariés et que la future loi ne doit en aucun cas autoriser et/ou favoriser une quelconque forme de dumping social. Cela pose également la question de l’articulation entre la restructuration des branches engagées au sein de la CNNC et la poursuite de la réforme du code du travail. Ne serait-il pas préférable de terminer le chantier de la restructuration des branches afin d’avoir une stabilité préalable à une réflexion sur l’articulation de la norme (accord d’entreprise/ordre public conventionnel/ordre public légal) ?

La Ministre du Travail répond, à l’inverse, que la clarté dans l’articulation des normes permettrait d’avancer concernant la restructuration des branches. Elle précise que la question de la décentralisation de la négociation collective doit permettre de clarifier précisément ce que l’on négocie à chacun des niveaux. Elle attend des propositions des syndicats. Il convient ainsi de déterminer pour chacun des domaines ce qui doit relever de l’accord d’entreprise, ce qui doit relever de la branche concernant le supplétif ou l’encadrement avec une réponse différenciée selon les domaines. Le socle commun serait redéfini mais non modifié.

6° – La CGT réaffirme sa volonté de réformer le code du travail. La CGT n’est pas pour un statu-quo. Elle propose de simplifier le code du travail en supprimant toutes les dérogations introduites de par la volonté du MEDEF. La nouvelle proposition du code du travail produite par le groupe de recherches d’universitaires en droit du travail (GR-PACT) illustre qu’il est possible de simplifier le code du travail tout en renforçant les droits et garanties des salariés.

Pour la Ministre du Travail, il s’agit pour le gouvernement de concilier liberté pour les entreprises et sécurisation des salariés.

7° – Renforcer les missions et la représentativité des instances représentatives du personnel.

La CGT a rappelé ses griefs concernant l’instauration d’une instance unique de représentation des personnels qui conduit à une professionnalisation du syndicalisme et à amoindrir le rôle primordial du CHSCT, qui ne peut se convertir en une simple commission. La CGT a rappelé le rôle central du CHSCT à l’heure où, dans certains secteurs comme le BTP, c’est encore un salarié par jour qui meurt. Il est indispensable de renforcer les missions et les structures de représentation du personnel et de conserver leurs spécificités. Ainsi, la généralisation de comités inter-entreprises permettrait de donner plus de lisibilité pour les relations donneuses d’ordre/sous-traitant aussi bien pour les salariés que pour les petites entreprises.

Le Premier Ministre et la Ministre du Travail se défendent de vouloir baisser la garde sur la santé et la sécurité des travailleurs avec la mise en place d’une instance unique. L’objectif est de maintenir les missions en associant les salariés à la définition des risques tout en permettant de fluidifier les relations sociales.

La CGT a avancé la nécessité, afin d’assurer la représentation des salariés dans les entreprises qui en sont dépourvues, d’ouvrir la possibilité de mandatement aux seules organisations syndicales représentatives de la branche. Cela ouvre également le débat sur le droit d’expression des salariés et le pouvoir d’intervention des représentants du personnel.

8° – Demande d’une étude sur le travail.

La CGT demande l’ouverture d’une négociation sociale sur la question du travail prenant en compte la notion de mal-travail, de ses conséquences sur les travailleuses et travailleurs et sur l’efficacité des entreprises et services.

Pas de réponse du Premier Ministre et de la Ministre du Travail.

9° – Rappel de notre opposition totale au plafonnement des indemnités prud’homales.

La CGT réaffirme son opposition à la mise en place d’un barème d’indemnisation prud’homal pour licenciement abusif qui constitue une porte ouverte à la précarisation du salariat.

La Ministre du Travail considère que cela permettrait de dynamiser l’emploi en donnant plus de visibilité aux PME sur le niveau des indemnités prud’homales.

La CGT a également posé la question du devenir du CPA en précisant que nous portions un projet beaucoup plus ambitieux de sécurité sociale professionnelle.

La Ministre du Travail affirme vouloir poursuivre en donnant des droits réels aux salariés notamment d’accompagnement. Pas un mot sur la pénibilité.

Le Premier Ministre a interrogé la CGT sur son positionnement sur le référendum d’entreprise. La CGT a rappelé sa volonté de consulter les salariés sur toutes les questions qu’ils souhaitent. En aucun cas le référendum d’entreprise ne peut être assimilé à cette libre consultation dans la mesure où elle ne porte que sur la seule question voulue par l’employeur en plaçant les salariés sous un chantage à l’emploi amenant à leur division. Nous avons rappelé la nécessité d’une stricte application de l’accord majoritaire à 50% et non un contournement. Concernant la question de l’assurance-chômage, la CGT a fait état des propositions qu’elle avait formulées lors de la négociation : égalité salariale femme/homme ; déplafonnement des cotisations sur les hauts salaires (13000 € par mois) ; taxation des contrats courts qui permettraient d’augmenter le volume des recettes et d’améliorer l’indemnisation des privés d’emploi. En aucun cas la formation professionnelle des salariés en activité ne doit être sacrifiée sur l’autel de l’assurance-chômage. Enfin, Philippe Martinez a fait part du mécontentement de la CGT d’entendre des déclarations comme celles du Ministre de l’Economie, Bruno Lemaire, à propos des salariés de GM&S, auxquels il a demandé un effort de productivité et invite les ministres à se rendre plus souvent dans les entreprises afin de constater la réalité du travail.

En conclusion, Philippe Martinez a attiré l’attention du Premier Ministre sur le conflit des salariés du transport routier de produits dangereux. Il n’est pas acceptable que le patronat refuse toute discussion avec les organisations syndicales. C’est un exemple de la réalité de la négociation collective. Le Gouvernement doit s’en mêler.

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